2ème Journée des soins palliatifs en Île-de-France

le Collectif francilien d’accompagnants bénévoles en soins palliatifs et deuil1 a organisé  samedi 2 décembre 2017 à l’Hôpital Georges Pompidou une journée sur les soins palliatifs un approche humaine, politique et économique. Synthèse de Christine Gouvion de Saint-Cyr bénévole à l’ASP fondatrice.

En quoi des sujets aussi intimes et personnels que la douleur aigue vécue suite à une maladie grave, la souffrance, la fin de vie, le deuil peuvent-ils constituer un enjeu politique, économique et sociétal ?

Les cas très médiatisés et dramatiques de V. Humbert, V. Lambert et de A. Bert posent régulièrement la question du droit en France à l’euthanasie ou au suicide assisté. Pierre Moulin, Maître de conférences de l’Université de Lorraine et chercheur associé à l’INSERM, n’a pas hésité à présenter ces débats comme une vague de fond s’attaquant à la loi actuelle qui cherche à donner accès à tous aux soins palliatifs.
Après avoir rappelé l’évolution de la mort dans notre société et de sa représentation, Pierre Moulin a mis en avant le lien entre les grandes peurs existentielles de chacun face à une mort annoncée, de souffrir et d’être abandonné et la question de l’euthanasie. Avant de conclure sur l’importance de développer une culture palliative la plus large possible pour répondre à ces peurs légitimes, Il a pointé du doigt, ce qu’il a nommé la plus grande utopie politique inscrite dans la loi Claeys-Léonetti de février 2016 : la suppression de toute souffrance, grâce à la sédation profonde et continue, un programme politique de taille !

Une table ronde en présence de Michel Debout, Président du Comité économique, social et culturel au parti socialiste, Michèle de Vaucouleurs, député des Yvelines, la République en marche, membre de la commission sociale et Alain Ramadier, député de Seine Saint Denis, les Républicains, membre de la commission sociale, a permis aux représentants présents de trois grands partis politiques français d’exprimer unanimement leur engagement pour le développement des soins palliatifs. Au cours des échanges qui ont suivi les débats, un des organisateurs de la journée a interpelé Michel Debout sur son engagement, en lui demandant s’il était personnel ou socialiste, dans la mesure où le candidat PS aux élections présidentielles, Benoit Hamon s’était déclaré pour l’euthanasie, tout comme le candidat de France insoumise, dont les partis, invités à participer à cette table ronde, n’avaient pas répondu à l’invitation du collectif. C’est avec vigueur et humour que Michel Debout a fait remarquer que François Mitterrand s’était prononcé en faveur des soins palliatifs et qu’on ne pouvait douter qu’il représente le parti socialiste, tout comme d’autres éminents membres du parti2. Michèle de Vaucouleurs a rappelé la position de la ministre des solidarités et de la santé, Agnes Buzyn3, interpelée ces dernières semaines sur la possibilité de faire évoluer la loi Claeys-Léonetti vers l’autorisation du suicide assisté ou de l’euthanasie : la ministre souhaite évaluer tout d’abord la façon dont la dernière loi est mise en œuvre avant d’envisager toute évolution. Enfin Alain Ramadier a évoqué la possibilité que 2018 soit décrétée « année des soins palliatifs », mesure qu’il soutiendrait activement.

Les témoignages des soignants, des bénévoles et des personnes concernées ont convergé vers un triple constat :

  • bien que l’accès aux soins palliatifs soit un droit, peu de personnes en bénéficient : Les équipes médicales spécialisées en soins palliatifs tirent la sonnette d’alarme sur leur incapacité à prendre en charge l’ensemble des patients douloureux nécessitant des soins palliatifs, faute de relais dans les services (manque de disponibilité, absence de culture palliative) ;
  • lorsqu’une personne bénéficie de soins palliatifs on constate des améliorations significatives de son état de santé, physiques et morales, faisant évoluer ses demandes et lui redonnant l’envie de vivre pleinement ;
  • les soins palliatifs restent encore trop synonymes de mort annoncée et sont perçus comme un constat d’échec de la médecine, par la plupart des soignants eux même, alors qu’ils sont une médecine technique et humaine, deux adjectifs qualificatifs indissociables, qui permet de redonner un temps de vie riche et essentiel. En raison de cette distorsion d’image, c’est bien trop tardivement que les soins palliatifs sont généralement proposés.

Les débats ont porté sur les méthodes à employer pour diffuser cette culture palliative. Le public a été interpelé sur le devoir de chacun de militer, en élevant la voix, pour faire connaitre à chacun ses droits à ne pas être abandonné et laissé dans des souffrances indignes. L’exemple de l’action menée en son temps par Act UP pour faire connaitre les ravages du sida et les moyens de s’en protéger a été mis en avant. Les bénévoles présents ont pu exprimer leur difficulté à placer leur action sur ce terrain, alors que leur savoir-faire est dans l’écoute bienveillante et respectueuse des personnes.

Mme Elisabeth d’Estaintot, de l’ARS Île-de-France a réaffirmé son rôle auprès du public et des usagers pour traiter les plaintes quant au non-respect de la loi Claeys-Léonetti notamment, même si force est de constater que cet organisme est insuffisamment connu lui aussi.

La journée s’est clôturée par un débat sur les médias avec la participation de Loup Besmond de Senneville journaliste à la Croix, et Erwan le Morhedec, journaliste à la vie, au cours duquel des pistes de réflexion sur le rôle des média dans la diffusion de la culture palliative ainsi que ses limites, ont été passé en revue.

 

Le Collectif francilien peut se réjouir d’afficher une vision commune et transversale – associations, soignants, personnes concernés, institutions, agence scientifique…- quant aux bienfaits des soins palliatifs mais il lui reste un vaste sujet de réflexion quant aux modalités de diffusion et d’infusion auprès du grand public de cette nécessaire et bienveillante culture palliative.  

Le Collectif s’est constitué en 2013 et regroupe les associations : AIM Jean Garnier, ASP fondatrice, ASP Yvelines, ASP 91, Empreintes, Vivre son deuil Île-de France, Jalmalv Paris-Île-de France, petits frères des Pauvres, Rivages

quelques unes des personnalités du parti socialiste ayant pris fait et cause pour le développement des soins palliatifs : F Mitterrand : il a préfacé « la mort intime » de Marie de Hennezel ; R. Badinter : préface du livre de J. Léonetti ; A. Claeys : Vote de la dernière date sur les soins palliatifs en février 2016, par une assemblée de majorité socialiste (xx%) à xx% des suffrages.

Agnés Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, le15 septembre 2017 sur France Inter : « En France, il y a eu beaucoup de débats sur la fin de vie qui ont abouti à une loi, la loi Claeys -Leonetti, qui permet une sédation profonde et prolongée pour les patients en fin de vie. Cela a déjà suscité des débats très compliqués. Et cette loi n’est pas encore complètement déployée partout. J’ai expliqué à Mme Bert que pour l’ instant je souhaitais d’abord faire une évaluation de la façon dont cette loi était mise en œuvre dans notre pays « .
Le 22 octobre 2017 au Grand Jury de RTL, s’est dite défavorable à l’application, en France, des mêmes méthodes pour abréger la fin de vie  (injection létale : euthanasie) qu’en Belgique. Retrouvez le lien sur le site de l’ASP fondatrice.